Le marché de l'immobilier en plein paradoxe selon Primeview

Les prix baissent, les taux d'intérêt aussi, et pourtant...

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Des prix en baisse, et des taux d'emprunt en chute libre... l'équation pourrait sourire aux pros de l'immobilier, mais c'est l'inverse qui se produit ! Le volume des prêts accordés s'effondre et le nombre de transactions chute.

Une situation qui tend à confirmer l'hypothèse d'une bulle immobilière très française comme le soutient le cabinet d'études économiques Primeview.

Le secteur de l'immobilier, très largement occupé par les réseaux en franchise, vit un vrai paradoxe actuellement. En effet, les taux d'emprunt historiquement bas devraient normalement doper le marché, mais il n'en ai rien. Le tassement des prix des biens à la vente devrait aussi doper le marché, mais il n'en ai rien.... au contraire même. Les volumes de transactions plongent et les volumes de prêts octroyés s'effondrent.

Comment expliquer ce paradoxe ? Selon le cabinet d'études économiques indépendant Primeview, cette situation atteste que la France est en pleine bulle immobilière. Et le retour de bâton sera difficile pour les propriétaires puisque les prix des biens pourraient s'effondrer sévèrement à l'horizon de 5 à 10 ans.

Une baisse avérée des volumes de transaction

Selon la Fnaim, si la baisse des prix constatée est très restreinte, de l'ordre de 0,6 % au 3e trimestre par rapport au 2e trimestre (- 1,10 % depuis le début de l'année), le volume des transactions quant à lui est en chute sévère avec une baisse constatée d'au moins 15 % en 2012 par rapport à l'année dernière. Logiquement, cette baisse des volumes de transactions a un impact important sur les octrois de prêts.
Ainsi, selon les derniers chiffres de l'Observatoire Crédit Logement/CSA, en 9 mois, le volume des prêts immobilier accordés est en recul de 30,5 % ! Et pourtant, toujours selon les chiffres de l'Observatoire Crédit Logement, les taux actuels de prêt sont plus qu'avantageux pour les acheteurs : depuis mars 2012, les taux ont en effet « reculé de 52 points de base pour s’établir à 3,43 % en septembre et revenir ainsi vers leur point bas de novembre 2010 qui était de 3,25 % ». En octobre les taux ont continué leur repli à 3,37 % en moyenne contre 3,44 % en septembre et 3,51 % en août.

Dans ces conditions, pourquoi le marché ne décolle pas ? Selon la Fnaim, les causes de cette situation reviennent à la crise, mais aussi aux incertitudes pesant sur les mesures gouvernementales pour encourager les Français à acheter. Et si la Fnaim évoque bien l'hypothèse d'une baisse de l'ordre de 3 à 5 % des prix en 2013, rien n'est moins sûr.

L'hypothèse d'une bulle immobilière

Pour le cabinet Primeview, les causes de cette situation paradoxale sont à rechercher ailleurs. « Tous les leviers qui ont permis la hausse des prix de la pierre vont progressivement disparaître » prévient ainsi Primeview. Parmi ces piliers, celui de la croissance « de + 161 % de l’immobilier entre 1998 et 2011 » porté par « l’assouplissement des conditions de financement (responsable de près des deux tiers de la hausse depuis 13 ans) » arrive à son terme.

La baisse des taux d’intérêt, l’allongement de la durée des prêts et la moindre exigence des banques concernant le taux d’apport appartiennent désormais au passé. « La musique s’est malheureusement arrêtée pour les établissements financiers, désormais dans l’œil du cyclone d’un durcissement de règlementation (nouvelles exigences de ratios de fonds propres avec la réglementation Bâle III). » Le durcissement des conditions financières déjà amorcé, va avoir des conséquences lourdes : augmentation des taux, baisse drastique des durées d'emprunt et hausse des apports réclamés. Cette nouvelle donne pourrait bien faire éclater la bulle immobilière actuelle.

Une baisse des prix de 30 à 40 %

Dans le scénario dessiné par Primeview, si la hausse des taux reste modérée (100 points de base) réduisant d’environ 10 % la capacité d’emprunt des ménages, la baisse s'annonce plus massive pour la durée d'emprunt. Pourquoi ? Selon Primeview, « c’est bien cette variable qui a été la principale responsable de la dérive des prix de la pierre par rapport aux revenus disponibles depuis la fin des années 90, avec un allongement de 14 ans à plus de 20 ans en moyenne de la durée des emprunts pour l’achat d’une résidence principale (et même près de 22 années pour un primo-accédant à la mi 2011…). »

En retournant à des durées d'emprunt de 14 ans, comme avant la bulle immobilière, soit 6 ans de moins en moyenne qu'actuellement, le raccourcissement « grèverait à lui seul la capacité d’emprunt des ménages de – 18 % à – 24 % en fonction du taux d’intérêt initial. » Si ce scénario se concrétise, cela créera selon Primeview un « trou d'air conséquent sur la capacité d’achat des emprunteurs ». Si on n'y ajoute « la disparition progressive du soutien inconditionnel que l’Etat portait au secteur depuis plus de 15 ans, tous les paramètres semblent réunis pour que l’immobilier français rentre dans le rang : nous prévoyons ainsi une baisse de - 30 % à – 40 % des prix de la pierre dans les 5 à 10 années à venir. »

Quelles conséquences pour les pros de l'immobilier ?

Si l'hypothèse d'une bulle immobilière est certes loin d'être partagée par tous, les arguments développés par Primeview pour démontrer que cette bulle spéculative existe bien, sont troublants. Et si cette hypothèse se confirme, les pros de l'immobilier vont inévitablement devoir s'adapter lorsque la bulle se dégonflera. Quelles seront les conséquences ? Pendant la période « trou d'air » évoquée par Primeview, vendeurs et acheteurs seront certainement en perte de repères. Les prix étant chaque jour plus bas, chacun tentera de faire une bonne affaire.

L'attentisme pourrait être de rigueur. C'est dans cette période que les réseaux en franchise dans l'immobilier devront redoubler d'arguments et de conseils pour rassurer à la fois les vendeurs et les acheteurs. Sachant que la capacité d'emprunt de chacun sera amenée à se réduire, le volume de transactions devrait continuer de baisser. Une fois cette période de transition passée, le rythme des ventes devrait reprendre leurs cours.

Les agences immobilières pourront alors souffler, mais les volumes devront être plus conséquents pour garder des marges correctes. Les réseaux qui ont bâti leurs stratégies de différenciation sur des taux de commissions discounts pourraient bien se voir obligés de s'adapter pour que leurs agences gardent un niveau de rémunération suffisant face à des prix de transactions en baisse importante.

Dominique André-Chaigneau, Franchise Habitat©

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